début des années 70 : la Semaine de la Terre

la Semaine de la Terre (début des années 70)

un moment de grâce pour la nouvelle gauche écologiste

photo Igor Muchins
la photo dédicacée par Igor : « L’une des 1ères manifs écolo à Paris en 1971. Mouna en plein discours. Derrière lui, un jeune militant avec l’affiche « Y’a bon pollution » : Alain-Claude Galtié ! »

première manifestation de La Semaine de la Terre, Paris, Bois de Boulogne avril 1971

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sommaire

Janis nous avait déjà quittés depuis sept mois !
(ici, vue par Tono Mollà)

« Vous n’êtes qu’une poignée mais cette réunion est un événement plus important que le vol de Monsieur Pompidou demain sur le Concorde ! »

René Barjavel

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L’urgence et l’idée


la destruction de Bornéo illustre parfaitement la régression générale organisée par les forces auxquelles les écologistes s’opposaient

Le Club Méditerranée renouvelle son animation  » culturelle « 

Au cours d’une conférence de presse tenue dans son  » village  » de Villars-sur-Ollon (Suisse), le Club Méditerranée a présenté le programme de ses activités culturelles en 1970.

https://www.lemonde.fr/archives/article/1970/03/09/le-club-mediterranee-renouvelle-son-animation-culturelle_2662761_1819218.html

au centre, Jean Sendy qui était en même temps que moi à Cefalù

* Une mémoire du mouvement écologiste 1 (chercher Premières conférences-débats écologistes)

 

http://awakenings2012.blogspot.fr/2013/04/earth-day_2574.html

https://en.wikipedia.org/wiki/Earth_Day#Earth_Day_1970

« Nous voulons lutter contre les pollutions, contre la destruction du milieu naturel, contre la dégradation de l’environnement urbain, contre le massacre des sites, contre l’empoisonnement massif de notre milieu de vie, les engrais chimiques, les déchets radioactifs…


Nous refusons une planète entièrement urbanisée, laide et croulante d’habitants.
Nous remettons en cause la foi aveugle en un progrès automatique et indéfini.
Nous voulons célébrer la Terre, planète vivante, dénoncer son saccage, montrer que les solutions existent pour sauver et restaurer notre milieu de vie
 »


printemps 1969

Voyons… Comment appelle-t-on une « profession de foi » que l’on n’applique pas, ou juste à doses homéopathiques ?

Mouna, Chantal Messiez et.. (?) devant la Bourse de Paris

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Ont rejoint la Semaine de la Terre

René Barjavel

l’écrivain sensible, arcadien, le plus proche de la nouvelle gauche.

http://www.ina.fr/audio/PHD99237473/rene-barjavel.fr.html

René Barjavel
24 janvier 1911 – 24 novembre 1985

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Jean Carlier

fondateur, avec Pierre Pellerin, de l’Association des Journalistes et Ecrivains pour la Protection de la Nature, rédacteur en chef à RTL.

A ce moment, il était très enthousiaste et a aidé à faire connaître la Semaine de la Terre.

Pourtant, tout en continuant à nous faire risette, Carlier allait vite changer d’attitude et nous trahir copieusement (manipulations, censure, mensonges). Comment cela s’est-il passé ? Quand ? Pourquoi ? En fait, Jean Carlier participait déjà à un réseau aussi secret qu’étrange (Diogène), un « collège invisible de l’écologisme« . L’expression est de Jacques Grinevald qui participa à ce Diogène et à son nouveau développement (à partir de 1974/1975 : Ecoropa, European Network for Ecological Reflection and Action).

Il est remarquable que ce réseau ait été mis en place dès la fin des années 1960, au lendemain des appels au sabotage de la nouvelle gauche lancés par les néo-conservateurs américains (docilement suivis par Raymond Aron) *. Alarmée par les mouvements néerlandais et nord-américains, la réaction s’était donc organisée avant même que les écologistes français réussissent à se manifester collectivement.

* Intelligence de l’anticommunisme. Le Congrès pour la liberté de la culture à Paris 1950-1975, Fayard 1995

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Henri Charnay

qui était en train d’écrire « Alliance avec la vie » *,

* Plusieurs compagnons de la Semaine de la Terre et moi avons apporté notre petite contribution à cette « Alliance avec la vie » qui se construisait sur les tables et les murs, chez Henri Charnay (148, rue de Lourmel, dans le XVème arrondissement de Paris). Ce livre est un bon témoignage du niveau des remises en cause et de la générosité du mouvement écologiste de l’époque.

Le livre a été publié par les éditions de Breteuil

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Pierre Fournier

l’écologiste invité à Charlie Hebdo par Cavanna, lui qui allait fonder la Gueule Ouverte en 1972.

Je ne le connaissais même pas de nom, ce qui dit assez le foisonnement de l’époque : on ne savait où donner de la tête !


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Georges Krassovsky

philosophe pacifiste,

rédacteur du journal Combat pour l’Homme et créateur infatigable de manifestations pour la paix et la préservation de la biosphère.

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Aguigui Mouna

l’animateur pataphysicien, pacifiste, écologiste, cycliste de la rue parisienne.

Aguigui Mouna
1er octobre 1911 – 8 mai 1999

https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/hommage-a-aguigui-mouna-poete-de-l-201927

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Pierre Pellerin

entre autres, auteur de Nature, Attention poisons ! (1970),

fondateur de l’Association des Journalistes et Ecrivains pour la Protection de la Nature.

Curieusement, nous avions tout pour nous entendre et avons eu un très bon contact, mais il allait nous tourner le dos sitôt après – comme Jean Carlier et les autres journalistes de la même association. L’identité des comportements et leur simultanéité trahissent une consigne. Probablement une consigne du « collège invisible«  Diogène auquel Pellerin, Carlier et leur association de journalistes participaient.

rédacteur en chef du magazine la Vie des Bêtes,

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Lanza del Vasto,

le philosophe gandhien créateur des Communautés de l’Arche,

Lanza del Vasto
29 septembre 1901 – 5 janvier 1981

http://www.dailymotion.com/video/x5ojry_lanza-del-vasto-le-pelerin_webcam
http://www.dailymotion.com/video/xdd6ke_lanza-del-vasto-sur-la-nonviolence_webcam

en italien
http://www.youtube.com/watch?v=h_AlINCiPg0

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Paul-Emile Victor


Enregistrement Radioscopie de Jacques Chancel avec Paul-Émile Victor :
http://www.ina.fr/economie-et-societe/environnement-et-urbanisme/audio/PHD99228166/paul-emile-victor.fr.html

Paul-Emile Victor
28 juin 1907 – 7 mars 1995

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Alain Bombard
27 octobre 1924 – 19 juillet 2005
http://www.ina.fr/media/entretiens/audio/PHD97016808/alain-bombard.fr.html
 

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Célèbres ou méconnus, tous étaient associés dans la compréhension de la complémentarité des efforts pour la préservation du bien commun.

Jean Rostand
30 octobre 1894 – 4 septembre 1977
 

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Il avait 50 ans.
 
 

dans le dossier Jean Detton sur ce site : https://planetaryecology.com/jean-detton-lun-des-lanceurs-du-mouvement-ecologiste/

et sur Hervé le Nestour :

Grothendieck est mort le 13 novembre 2014 

Le trésor oublié du génie des maths  
par Philippe Douroux, Libération du 1er juillet 2012.
http://www.liberation.fr/sciences/2012/07/01/le-tresor-oublie-du-genie-des-maths_830399 
 

Alexander Grothendieck, sur les routes d’un génie
un documentaire de Catherine Aira et Yves le Pestipon :
https://www.youtube.com/watch?v=UO5KgnTY_fU
 

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Après la Semaine de la Terre

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C’était l’époque du mouvement écologiste

Nous écoutions

Jean Ferrat (La Montagne) depuis plusieurs années déjà

Graeme Allwright

Léo Ferré chantait « Avec le temps » et « La solitude ».

Cat Stevens chantait « Changes IV » (album « Teaser and the Firecat »).

Joan Baez chantait la balade de Sacco e Vanzetti sur la musique de Ennio Morricone :
http://www.youtube.com/watch?v=gcgYwTnBIIQ

C’était après les disparitions de Jimi Hendrix (septembre 1970)
http://www.youtube.com/watch?v=TKPzj3xcWO4
http://www.dailymotion.com/video/x5sx5h_jimi-hendrix-killing-floor-live-mon_music

de Janis Joplin (octobre 1970)
http://www.dailymotion.com/video/x18yzj_janis-joplinball-and-chain-live_music
http://www.youtube.com/watch?v=mzNEgcqWDG4
http://www.telerama.fr/cinema/pennebaker,47426.php#xtor=RSS-18

et avant celle de Jim Morrison (juillet 1971)
http://www.youtube.com/watch?v=QHFK1yKfiGo
http://www.dailymotion.com/video/xvznl_the-doors-hello-i-love-you_music

La mort des chanteurs annonçait la fin du mouvement de la contre-culture. Leur disparition des écrans radars aussi…
 

En 1970, Sixto Diaz Rodriguez sortait l’album « Cold Fact », puis « Coming from reality » en 1972. Sa carrière fut rapidement étouffée aux USA. Pourtant, le voyage d’une seule cassette déclencha un succès foudroyant en Afrique du Sud. Il y devint aussitôt un catalyseur de la remise en cause du système d’oppression, un symbole du mouvement qui remuait l’Afrique du Sud comme presque tout le monde : « the new left », la nouvelle gauche alternative, le mouvement de la révulsion devant la domination et son avatar capitaliste en pleine croissance. Mais Rodriguez n’en a rien su. Rodriguez qui était retourné sur les chantiers du bâtiments pour continuer à vivre. Rodriguez dont une rumeur a bientôt prétendu qu’il s’était suicidé en scène, comme pour éteindre la curiosité croissante de ses fans et limiter la contagion de sa popularité.
Son succès s’est poursuivi en Australie puis en Nouvelle Zélande sans relancer sa carrière, comme à l’insu de l’auteur. Il faut voir le film : Searching for Sugar Man
de Malik Bendjelloul
http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=200631.html
http://www.imdb.com/title/tt2125608/

This Is Not a Song, It’s an Outburst: Or, The Establishment Blues
http://www.youtube.com/watch?v=c_7u06P3ebU

Johnny lui-même n’avait pas échappé à l’influence de la nouvelle gauche écologiste :

Johnny Hallyday 1970 : La pollution (album VIE)
paroles de Jacques Lanzmann

Les lapins se meurent dans les champs pollués

Les poissons crevés dans les mers polluées, hé

Les hommes sont asphyxiés par l’air pollué

Les oiseaux muets dans les arbres pollués, hé

Le muguet fané au printemps pollué, hé

Les hommes sont usés dans ce siècle pollué

Mais dites-moi ce qu’il faut faire pour exister, hé

Quand la terre tout entière est polluée, hé

Les couleurs n’ont plus de vivacité, hé

Le soleil lui-même est dénaturé, hé

Les hommes sont complètement dépassés, hé

Mais dites-moi ce qu’il faut faire pour exister, hé, hé, hé

Quand la terre tout entière est polluée, hé, hé, hé, hé, hé

Les esprits vont finir par s’égarer, hé

La raison commence à vaciller, hé

Car les hommes s’évertuent à tout polluer, hé, hé, hé, hé, hé, hé

Les usines ne s’arrêtent pas de fumer

Les fumées ne s’arrêtent pas de polluer, hé, hé

Et les hommes continuent à fabriquer, hé, hé, hé, hé

Je sais moi ce qu’il faut faire pour exister

Il suffit d’arrêter de nous polluer, hé, hé, hé, hé

Hé, hé, polluer

Hé, hé, polluer

Ha, polluer

Hé, hé, polluer

Pour exister arrêtez de nous polluer, hé, hé

Read more: https://muzikum.eu/en/123-6179-201333/johnny-hallyday/la-pollution-lyrics.html#ixzz6jBSeRPDZ

https://www.google.com/search?channel=fs&client=ubuntu&q=johnny+la+pollution#fpstate=ive&vld=cid:6020c4fe,vid:yjZfbh8-LFM

Les fumées ne s’arrêtent pas de polluer” : Quand Johnny chantait le péril écologique

Qui a couru sur cette plage ?

Elle a dû être très belle

Est-ce que son sable était blanc ?

Est-ce qu’il y avait des fleurs jaunes

Dans le creux de chaque dune ?

J’aurais bien aimé toucher du sable

Un seule fois entre mes doigts

Qui a nagé dans cette rivière ?

Vous prétendez qu’elle était fraîche

Et descendait de la montagne

Est-ce qu’il y avait des galets dans le creux de chaque cascade ?

J’aurais bien aimé plonger mon corps

Une seule fois dans une rivière

Dites, ne me racontez pas d’histoire

Montrez-moi des photos pour voir

Si tout cela a vraiment existé

Vous m’affirmez qu’il y avait du sable

Et de l’herbe

Et des fleurs

Et de l’eau

Et des pierres

Et des arbres

Et des oiseaux ?

Allons, Ne vous moquez pas de moi !

Qui a marché dans ce chemin ?

Vous dites qu’il menait à une maison

Et qu’il y avait des enfants qui jouent autour

Vous êtes sûr que la photo n’est pas truquée ?

Vous pouvez m’assurer que cela a vraiment existé ?

Dites moi !

Allons, ne me racontez plus d’histoire !

J’ai besoin de toucher et de voir pour y croire

Vraiment, c’est vrai ?

Le sable était blanc ?

Vraiment c’est vrai ?

Il y avait des enfants ?

Des rivières ?

Des chemins ?

Des cailloux ?

Des maisons ?

C’est vrai ?

Ça a vraiment existé ?

Ça a vraiment existé ?

Vraiment ?

Vie (1970)

L’idole des jeunes au top de l’affiche qui interprète ce texte, et quelques autres, dit assez sur l’ambiance de l’époque et les ouvertures et les évolutions qui paraissaient évidentes.

 
 
En 1971, Don McLean créait Vincent (sur Vincent Van Gogh)
http://www.youtube.com/watch?v=dipFMJckZOM

et aussi American Pie
http://www.youtube.com/watch?v=pwUXHI_VJ5A&feature=endscreen&NR=1
About The day the music dead :
http://fr.wikipedia.org/wiki/The_Day_the_Music_Died
 

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Une expérience très révélatrice : le Mouvement Coopératif refuse le bio

A l’époque, je n’allais pas tarder à être viré du Mouvement Coopératif pour avoir proposé que les coopératives agricoles et les coopératives de consommation coopèrent à la production et à la distribution de produits bio. Le Mouvement Coopératif  avait déjà été largement infiltré par les agents du capitalisme, surtout la Coopération Agricole et la Coopération de Consommation, et il était en train d’être vidé de sa substance. Le remplacement du système capitaliste par une civilisation de l’entraide et du bien commun – un objectif premier du Mouvement Coopératif – n’était plus du tout à l’ordre du jour. Alors, le bio…

Cette expérience était démoralisante. Menée au coeur même d’un mouvement social historique, le plus capable d’aider à la transformation nécessaire pour éviter un désastre, elle révélait une situation déjà fortement compromise. Cela aurait mérité un examen approfondi et une réflexion collective. Je n’en avais ni les moyens ni la stimulation. En effet, à l’extérieur, aucun écologiste n’a prêté attention à cette aventure exemplaire, ne serait-ce que pour m’aider à surmonter la déception. Plus curieux encore, personne ne s’y est intéressé depuis !

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Une dynamique politique oubliée

Ce groupe de la Semaine de la Terre, était-ce les premiers pas de ce qui est nommé maintenant : « écologie politique » ?

  • Pas du tout ! Tout d’abord, les premiers pas avaient été faits bien avant nous par ceux dont on a une trace historique, et encore bien avant, car l’élan qui nous animait est au moins aussi ancien que notre famille biologique étendue, aussi ancien que la formation des premiers sentiments.
  • Non, encore, parce que l’expression « écologie politique » recouvre des formes dévoyées et dégénérées, politiciennes et non politiques, que nous voulions prévenir (la confiscation et la capitalisation des pouvoirs d’être et de faire), et dont nous allions devoir combattre les prémices.
  • Non parce que nous (et ceux qui nous ont précédé) voulions voir s’épanouir une conscience en mouvement pour accoucher une civilisation conviviale – une dynamique comparable à celle voulue par les acteurs du Mouvement Coopératif*. J’allais l’appeler écologisation (le Courrier de la Baleine n°6, mars 1974).

* « (…) tous ceux qui ont donné l’impulsion au mouvement coopératif et tous ceux qui à cette heure encore le soutiennent de leurs efforts et de leurs sympathies, sont des hommes qui ont vu dans la coopération une transformation, progressive sans doute, pacifique, cela va sans dire, mais radicale aussi de l’ordre social actuel. Pour tous ceux qui l’ont étudiée de près, la coopération est une nouvelle forme d’organisation industrielle tendant à se substituer à l’organisation actuelle : – Si elle n’est pas cela, elle n’est rien. », Charles Gide, L’Emancipation, octobre 1887.

  • Non, enfin, parce que cette réduction – « l’écologie politique » – a été créée par le lobby de la globalisation capitaliste, justement pour amollir, tromper et détourner la conscience qui grandissait. Dans notre révolte et nos projets, pas de spoliation-capitalisation des pouvoirs des hiérarchies politiciennes, mais beaucoup beaucoup de politique – le politique entre les mains de chacun et de tous, ensemble, comme une dynamique holistique.

Après la Semaine de la Terre, le groupe est devenu plus nombreux et a continué à informer et à débattre en se réunissant au moins chaque semaine dans un local prêté par Études et Chantiers. C’est vraiment là que, à la faveur des multiples apports d’information et débats, nous sommes passés d’une version incisive de la protection de la nature au projet alternatif au système capitaliste dominant. En particulier avec Hervé le Nestour, Jean Detton, Henri Charnay… ensemble, en contribuant chacun et en débattant passionnément, nous découvrîmes la nouvelle grille de lecture du monde avant même que Henri Laborit ne la dévoile. Joints aux connaissances sensibles acquises durant les années de protection de la nature, ces éclairages confirmèrent et radicalisèrent la philosophie politique et le projet alternatifs à ceux du système dominant. Quarante ans plus tard, en écoutant ceux qui, ayant accès aux media, se présentent comme écologistes, j’ai l’impression de rajeunir d’un coup et de revenir à l’époque de la Semaine de la Terre ! Beaucoup, et pas des moindres, semblent découvrir ce dont nous débattions dans les années 1970. Au tout début des années 1970. Témoignage de la régression due à la censure qui a été appliquée aux anciens.

Henri Laborit

Période fertile où un appel à la dénonciation des menaces contre la vie, et à la mutation de la civilisation, faisait pleuvoir des bonnes volontés et des compétences.

Période heureuse où tout était encore possible.

Malheureusement, tous ceux qui vinrent à nous ne furent pas aussi intéressants. A la rentrée 1971, un journaliste du Nouvel Observateur, Alain Hervé, nous invita à rejoindre la toute jeune structure – Les Amis de la Terre – qu’il venait de créer en extension de l’association étatsunienne Friends of the Earth. Nous n’aurions pas dû l’écouter.

37 ans après la Semaine de la Terre à laquelle il avait assisté, Alain Hervé semble avoir perdu la mémoire puisque, dans un papier paru au printemps 2008, il invente une autre histoire, avec d’autres personnages. Une histoire qui, comme par hasard, oublie complètement le mouvement social pour lui substituer un salon mondain tout à fait en phase avec les réseaux dominants qui ont grandement facilité le renforcement du capitalisme. Il est vrai que, dans les papiers à l’en-tête des Amis de la Terre de l’époque, la Semaine de la Terre n’apparaissait pas, et la plupart des personnes auxquelles il est attribué une fonction dans l’association nous étaient inconnues (?).

Parmi les curiosités, la revendication d’avoir fait, en 1973, la première publication écologiste, « avant La Gueule ouverte de Fournier« . Sauf que cette dernière est née durant le quatrième trimestre 1972, comme l’Agence de Presse Réhabilitation Ecologique avec son bulletin et la revue Ecologie. Au moins. De même, la pensée écologiste était beaucoup mieux représentée, et depuis plus longtemps, par Fournier et Cavanna dans Charlie Hebdo que par un Nouvel Observateur tout acquis au réformisme dans le cadre capitaliste, et au productivisme depuis 1964 (il s’inscrivait dans la « troisième voie » qui allait donner la « deuxième gauche« , avant quelques autres avatars ouvertement pro-capitalistes).
(L’écologie est-elle née en 1968 ?, L’Ecologiste n°25, printemps 2008).

Mais nous avons déjà vu, avec la présentation de Jean Carlier, que Alain Hervé participait à un obscur réseau d’influence organisé par le capitalisme pour « réguler » les écologistes… Obscur ? Plus précisément, aussi dissimulé que puissant.

Pierre Fournier avait parlé de la Semaine de la Terre dans Charlie Hebdo (La Gueule Ouverte n’était pas encore née). On en trouve trace dans Fournier précurseur de l’écologie, de Patrick Gominet et Danielle Fournier, Les Cahiers dessinés, page 149 et 150.

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Les tracts

Un tract annonçant la Semaine de la Terre commençait, en première page, par les encouragements d’un diable rigolard :


C’EST BIEN,
C’EST TRÈS BIEN…
VOUS ÊTES DANS LA BONNE VOIE !
IL FAUT PERSÉVÉRER :

Continuez à couvrir la Terre de votre progéniture, il y a encore de la place et quand, demain, il n’y en aura plus, on en fera…

Continuez à multiplier les tas d’ordures, êtes-vous sûr d’avoir tout souillé ?

Continuez à détruire, il reste des animaux libres, des plantes non piétinées, des hommes « primitifs », des paysages intacts…

Continuez à polluer, peut-être y a-t-il encore des ruisseaux, de lopins de terre, des aliments non corrompus…

Continuez à vous abrutir dans les mille joies de la « vie moderne »

ENCORE UN PETIT EFFORT

Consommez le plus possible
Encouragez le gaspillage des ressources naturelles
Construisez, construisez n’importe quoi : des clapiers à citadins, des résidences secondaires, des autoroutes, par exemple
Arrachez la végétation, détruisez les tourbières, recouvrez la mer de pétrole, il y a trop d’oxygène
Déboisez, comblez les marécages, stabilisez les berges des rivières, il n’y a pas assez d’inondations
etc.

Travaillez à la PROSPÉRITÉ et à l’AVENIR

avec un dessin de François Feer

l’autre côté du tract était plus sérieux :


Êtes-vous fous ?


Tout croule autour de nous : le raz de marée démographique dévore l’espace et charrie la violence, l’économie de la civilisation industrielle dilapide les ressources naturelles, les pollutions se multiplient et leurs effets se conjuguent, les mauvaises pratiques agricoles dégradent les sols, la Vie sauvage s’éteint, les régions les plus lointaines sont bouffées par le béton et le macadam, les rivages de vos vacances se couvrent de pétrole et d’emballages en plastique, vos villes deviennent des centres d’élevage industriel, la « vie moderne » abrutit les âmes et broie les corps…

Sortez de votre torpeur
Citadins, regardez le ciel quand aucun nuage ne le trouble, il est crasseux, tout gris de poussières et de fumées, c’est le ciel que vous trouverez bientôt à la campagne et même au bord de mer…

refusez le cauchemar

IL N’Y A PAS DE PLANÈTE DE RECHANGE

ce que nous voulons :

une population stable


une économie de recyclage des produits usés


le développement de l’exploitation de l’énergie solaire


le remplacement des pesticides chimiques par les moyens biologiques de lutte contre les parasites


des produits agricoles de qualité


la protection intégrale des espèces animales et végétales


la disparition des moteurs à combustion


l’arrêt de l’urbanisation désordonnée


une architecture de qualité et un urbanisme à la mesure de l’homme

du 2 au 9 mai 1971
SEMAINE DE LA TERRE

Joignez-vous au Comité d’Organisation de la Semaine de la Terre
Venez le mardi soir 19H : 63, rue de Sèvres – Paris VIème – métro Sèvres Babylone
Adresse postale : 63, rue de Sèvres – Paris Vième (Etudes et Chantiers)

POUR MENER A BIEN CETTE ENTREPRISE, VOS DONS SERONT LES BIENVENUS, MERCI

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36 ans plus tard, en 2017, Let’s Pollute nous rajeunit

C’est étonnant que nous en soyons toujours là ! Dans une situation comparable à celle de nos pires cauchemars de l’époque.

Une pancarte de la Semaine de la Terre

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Dans un autre tract, un patron grassouillet, lunettes design et gros cigare, avertissait :

NE VOUS LAISSEZ PAS ABUSER PAR LES RÉTROGRADES

Les pollutions existent, c’est vrai, mais il ne faut pas exagérer leur importance. En fait, ce n’est pas un problème grave, on s’en accommode fort bien, mais si ! Et puis ce sont des signes de prospérité, les sous-développés voudraient bien vivre dans un environnement pollué !

La surpopulation est un faux problème : il y a assez de sols inexploités pour nourrir 20 à 30 milliards d’hommes, peut-être plus… Les guerres ? Tout le monde sait qu’elles ont des origines exclusivement idéologiques.

Le massacre des indiens, la clochardisation des peuples primitifs, la disparition des animaux et végétaux sauvages sont des signes du recul de la barbarie devant la civilisation.

Ne vous inquiétez pas si les matières premières s’épuisent, on les remplacera par d’autres produits.

Qui ne se réjouirait de voir les mal-logés dans de luxueux appartements HLM grâce à « l’urbanisation désordonnée » ?

Toutes ces histoires autour de la qualité des aliments, des résidus de produits chimiques, ne sont que billevesées… La preuve : on vit plus vieux que jamais.

Aliénation ? Contraintes ? Angoisse ? Peuh !

Croyez-moi, il n’y a pas lieu de s’inquiéter, l’opulence est pour demain

Changement de ton au verso :


IL N’Y A PAS DE PLANÈTE DE RECHANGE

Depuis quelques décennies, par son goût pour le jeu de l’apprenti sorcier, l’Homme prépare l’Apocalypse selon Saint Jean :
« Et il y eut de la grêle et du feu mêlés de sang, qui furent jetés sur la Terre ; et le tiers de laTerre fut brûlé, et le tiers des arbres fut brûlé, et toute herbe verte fut brûlée (…) le tiers des créatures qui étaient dans la mer et qui avaient vie mourut (…) le tiers des eaux fut changé en absinthe, et beaucoup d’hommes moururent par les eaux, parce qu’elles étaient devenues amères (…) le jour perdit un tiers de sa clarté, et la nuit de même (…) En ces jours-là, les hommes chercheront la mort, et ils la trouveront pas ; ils désireront mourir, et la mort fuira loin d’eux. »

Exagération ?

Non, les recherches scientifiques les plus récentes prouvent le bien-fondé des craintes que nous exprimons. Nous ne sommes qu’au B-A BA de l’étude de la Terre mais notre petit savoir nous permet de condamner la civilisation industrielle actuelle et la croissance démographique.

IL FAUT :

Enrayer la croissance de la population

Supprimer les déchets grâce à une économie de recyclage

Tendre vers la stabilité économique

Réduire la consommation d’énergie

Utiliser l’énergie solaire en remplacement de l’énergie atomique

Organiser l’urbanisation et opter pour une architecture de qualité

Une agriculture de qualité adaptée au milieu naturel

Substituer aux pesticides chimiques les méthodes biologiques de lutte contre les animaux et les végétaux indésirables en forts peuplements

Reboiser et, d’une manière générale, reconstituer les milieux naturels détruits et abandonnés

Encourager les agriculteurs à entretenir le patrimoine campagnard, les conseiller et les rémunérer en conséquence

Veiller à la conservation de toutes les formes animales et végétales

Respecter les peuples de civilisations « primitives » et leurs traditions. Ne pas chercher à tout prix à les « intégrer »

Parce que vous êtes conscient de vos responsabilités et que vous n’avez ni l’intention de vous suicider ni le désir de croupir sur un tas d’ordures, vous participerez à l’action de la Semaine de la Terre
du 2 au 9 mai 1971

SEMAINE DE LA TERRE
Joignez-vous au comité d’organisation de la Semaine de la Terre
Venez 33, rue Linné, Paris Vème – métro Jussieu – le mercredi soir 19 H

dessin de François Feer

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A l’époque, dire simplement qu’entre les autres animaux et nous il n’y avait pas de rupture et que nous appartenions à la même évolution, provoquait sursauts, réactions de rejet et indignations. Souligner que les pollutions étaient dangereuses, et les destructions écologiques une menace pour tous, étonnait. Il faudra attendre plus de 40 ans pour que la pollution atmosphérique soit simplement reconnue dangereuse pour la santé !

« Les experts ont conclu qu’il existe des preuves suffisantes pour dire que l’exposition à la pollution de l’air extérieur provoque le cancer du poumon. Ils ont également noté une association positive avec un risque accru de cancer de la vessie » affirme le Centre International de Recherche sur le Cancer. Selon cet organisme qui dépend de l’OMS, 223.000 personnes sont décédées d’un cancer du poumon en lien avec la pollution de l’air en 2010. Ce sont les dernières données disponibles.
http://www.franceinfo.fr/monde/l-oms-classe-la-pollution-de-l-air-exterieur-comme-cancerigene-1180003-2013-10-17

Dans ces tracts, la figure d’un démon tiré d’un imaginaire ancien et l’évocation de l’Apocalypse selon Saint Jean peuvent, aujourd’hui, surprendre. Ils m’avaient été suggérés par la lecture de « La Danse avec le Diable » de Günther Schwab, fondateur de l’Union Mondiale pour la Protection de la Vie en 1958. Ce livre avait eu un grand retentissement dans les années soixante.

Présentation :
Le diable est un homme d’affaires prospère qui dirige le ministère de l’Extermination. Son programme ? Empoisonnement de l’air, pollution et gaspillage des eaux, dégénérescence de l’homme par l’alimentation dénaturée, le bruit, la course au standard de vie, l’abus de la chimie en médecine, en agriculture, l’augmentation de la radioactivité, et l’empoisonnement progressif des âmes par les images, etc.
Un journaliste américain, un technicien allemand, une jeune Française médecin et un poète suédois décident d’interviewer le « Prince de ce monde ».

Ce livre de Günther Schwab a été réédité par le Courrier du Livre en 2010

dessin de François Feer

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En effet, déjà dans des articles…

Pierre Fournier avait rendu compte de l’événement dans Charlie Hebdo et avait même repris le texte d’un autre tract de la Semaine de la Terre :

Charlie Hebdo n°26, 17 mai 1971
« On me paye pour que je m’exprime, alors je m’exprime« 

Monsieur Jean-Paul Sartre sort avec un groupe d’amis du café le Saint Séverin, boulevard Saint Michel, et s’engouffre dans un taxi. Le feu est au rouge et le taxi bloqué, Mouna se précipite et s’agrippe à la portière.
« Monsieur Jean-Paul Sartre, que pensez-vous de la pollution ?« 
Monsieur Jean-Paul Sartre baisse le nez et ne dit rien.
« Monsieur Jean-Paul Sartre, je vous cause ! Que pensez-vous de la pollution ?« 

Monsieur Jean-Paul Sartre ne dit toujours rien. Le taxi démarre. « J’ai 15 témoins ! Dit Mouna, Monsieur Jean-Paul Sartre n’a rien à dire sur la pollution ! »

Monsieur Jean-Paul Sartre est un spécialiste des attitudes courageuses. Une attitude n’est courageuse qu’à la condition qu’il existe déjà un public suffisant, et suffisamment averti, pour constater ce courage. Sinon, elle est simplement conne ou dingue. Monsieur Jean-Paul Sartre ne veut avoir l’air ni d’un con, ni d’un dingue. Il a choisi son public et, depuis, lui court après. Monsieur Jean-Paul Sartre a consacré sa vie à n’avoir pas l’air d’un vieux con. Le malheur est que plus il avance en âge, plus il a l’air d’un vieux con. Il n’a pas encore compris pourquoi.
(…)

Ils ne prient pas tous dans la rue. La plupart, même, ne prient jamais nulle part, ce qui est regrettable. Mais ils ont tous quelque chose d’inquiétant dans le regard. Et dès qu’ils l’ouvrent on a compris. « Ma fille Catherine a 8 ans, dit Krassowsky, je lui ai imposé de vivre dans un monde qui va disparaître, si je ne me battais pas de toutes mes forces pour que ce monde survive je n’oserais pas la regarder dans les yeux. – Et moi, dit Mouna, j’ai pas d’enfant ! Et j’ai 60 berges… Vous parlez si je m’en branle de l’avenir ! Ça m’empêche pas de gueuler ! » Des fanatiques. Il y a des établissements où ça se soigne, ce genre d’obsession, où ça se soigne même très bien. Et c’est entièrement remboursé par la Sécurité sociale.

J’ai assisté à une « conférence » organisée par mes potes de la « Semaine de la Terre » à la Fac des Sciences [Jussieu], pauvre Fac des Sciences ! où ces deux-là faisaient rire un public complaisant. Ce qui est navrant c’est que des types sérieux s’y laissent prendre, un mec comme Paul-Emile Victor qu’est même gaulliste paraît-il, c’est dire, n’avait pas craint de venir s’asseoir à côté d’eux, raconter lui aussi des sornettes, expliquer comment et pourquoi il nous reste 25 ans pour agir, pas plus, avant que la situation devienne irréversible et que nous ne crevions comme des rats. Un mec comme Barjavel qu’écrit dans France-Soir pourtant, cherchant sans doute à flatter son auditoire, a dit aux quatre pelés et un tondu présents ce soir-là : « Vous n’êtes qu’une poignée mais cette réunion est un événement plus important que le vol de Monsieur Pompidou demain sur le Concorde !« . Enorme. Et ça marche. Lucien Barnier devait venir, il est pas venu, il a dû bien peser le pour et le contre, ça vaut le coup de se mouiller ou pas ? Finalement ça vaut pas le coup. Depuis quelque temps ce chantre patenté du progrès salvateur et rédempteur sent que le vent tourne, il prépare sa reconversion, il donne des gages à droite et à gauche (…)

Mouna n’a pas interrogé qu’un philosophe de réputation mondiale, il a aussi interrogé les gens de la rue. Une dame a cru qu’il travaillait pour Monsieur Poujade : « Oh ! Moi je ne me plains pas, je suis très bien logée !« . Un monsieur a tout de suite vu à qui il avait affaire : « Con mystique !« .

Ils m’ont fait venir à la tribune, les vaches, et même ils m’ont posé une question, ya bien fallu que je réponde : « Monsieur Fournier de Charlie Hebdo, voyez-vous des possibilités d’actions concrètes ?« , c’était une perche, je l’ai saisie, j’ai enfourché mon dada, j’ai bafouillé qu’il fallait gueuler contre les centrales nucléaires, j’ai dit que j’étais pas l’obsédé de l’atome mais que j’avais choisi plus précisément ce thème-là parce que c’est le truc le plus énorme, le plus évident, le plus ignoré du public et le moins soupçonnable, sauf de la part du plus borné des marxistes et encore (quoiqu’il faille s’attendre à tout de la part du mec qui a reçu une bonne formation dialectique), d’être un moyen de récupération, de diversion, de mystification, merde, de tout ce que vous voudrez. Mourir c’est pas grave, mais ce qu’on voudrait pas c’est avoir l’air idiot, hein, c’est ça votre problème jeunomme ? J’ai regretté qu’il suffise de deux jours pour envoyer 40 000 connards jeter des oeillets sur une tombe oùsqu’on a chié dessus, et qu’il faille six mois de travail acharné pour en réunir 1 100 afin de protester contre une installation industrielle qui nous chiera directement dans la gueule à tous. Et puis, j’ai plus rien dit, j’ai même pas fini ma phrase, c’est Krassowsky qu’est venu à mon secours, qu’a trouvé le mot que je cherchais. J’aime pas causer. Ca m’emmerde encore plus que d’écrire.
(…)

On va révolutionner la révolution. Afin de ne plus mourir pour la révolution, on fera la révolution pour vivre, on vivra la révolution, on vivra. Ya plus que ça qui soit encore révolutionnaire. Vivre. Vivre. Enfin, on essaiera sans trop d’illusions. Avant que suffisamment de tous ces cons aient un peu compris ça qu’on leur explique, et la portée du truc, on a le temps de crever cent fois. Pour freiner la dégradation de l’environnement, il faudrait passer par un bouleversement fondamental et radical des mentalités. Or, il faut plusieurs siècles pour changer les bases de réflexion des hommes, et 25 ans suffiront pour que la dégradation de l’environnement devienne irréversible. C’est foutu. Mes petits potes du Comité d’Organisation de la Semaine de la Terre le savent bien mais, disent-ils, « On s’en fout ! Nous, on veut vivre ! Vivre !« . « Je veux vivre et que ça leur fasse envie ! » écrit un lecteur (…)

La « Fête de la Terre » fut un four total, Charlie Hebdo y a bien drainé le tiers des participants, « On vous fait vachement confiance, à vous les mecs de l’Hebdo, c’est comme quand Delfeil conseille un spectacle, on y fonce. Ca te fout la trouille, hein ? – Oui, j’avoue…« . J’en causerai peut-être la semaine prochaine, ça m’a inspiré de salutaires réflexions sur, non pas les limites de la non-violence, mais ses difficultés. Il me semble aussi que Lanza del Vasto nous a silencieusement donné une bonne leçon de non-violence véritable. C’est un art, et pas facile. Mouna aussi, dans un autre style. Si vous y étiez, dites-moi ce que vous en pensez.

Le 22 avril 70, les campus américains avaient organisé, dans tous les Etats-Unis, l’Earth Day, mouvement de protestation et de réflexion sur la survie de l’homme et de la nature.

Pour affirmer que la crise de l’environnement est au moins aussi grave en Europe, la Fédération Internationale de la Jeunesse pour l’Etude et la Conservation de l’Environnement a pris l’initiative de promouvoir du 1er au 6 juin 1971 la Semaine Internationale de la Terre. La Suède, la Finlande, les Pays-Bas, le Danemark et la Suisse sont en train de la préparer. Il y aura quelque chose en France le 6 juin paraît-il.

« Tu peux dire qu’on est un groupe informel de jeunes en liaison avec cette Fédération. On a voulu profiter de la Quinzaine de l’Environnement pour gueuler, avec un mois d’avance contre la technocratie, la connerie, le profit. Essayer surtout de faire comprendre que, sans remise en cause des structures, toute protection de l’environnement est condamnée à l’échec à long terme. Tu peux dire qu’on bosse avec Jeunes et Nature et Les Amis de la terre.« 

« On est bien récupérés ! » France-Soir les a montrés curant la Fontaine Saint-Michel mais a laissé croire qu’ils le faisaient sur la « recommandation de la Préfecture de Paris« , sur ordre de Poujade en somme, des sortes de CDR, quoi. La télé régionale alsacienne a bien montré, le 13 avril, le défilé de Fessenheim sans préciser que les mecs avaient manifesté CONTRE la Centrale ! Lisez Charlie Hebdo, la seule télé qui vous prenne pas pour des cons.

Dès les premiers pas, la manipulation et la récupération

« Je vois que des bourgeois ici ! C’est avec ceux-là que tu veux faire la révolution ? » Oui, en attendant que d’autres les rejoignent. Les « révolutionnaires » sont trop occupés, ils font caca sur la tombe à Momo, on peut pas tout faire.

C’est parce qu’il est con de laisser leur monopole aux boys-scouts en ce domaine qu’on peut sans déchoir adhérer par exemple à « Jeunes et Nature », émanation de la Société nationale pour la protection de la Nature, qui tend à conquérir son indépendance dans le cadre de la Fédération nationale des sociétés pour la protection de la Nature.

« Les Amis de la Terre » sont la branche française des « Friends of the Earth » qui ont obtenu, aux Etats-Unis, la suspension du projet S.S.T., ainsi que du projet de pipe-line à pétrole à travers l’Alaska, qui aurait démoli tout l’écosystème du Grand Nord, et de quelques projets de centrales nucléaires. C’est de leur exemple qu’est né le CSFR.

Pierre Fournier

« Jeunes et Nature », 129, boulevard Saint Germain (6è).
« Les Amis de la Terre », 25, Quai Voltaire (7è).


Il n’y a pas de planète de rechange.
dessin de François Feer
MAIS PLUS POUR LONGTEMPS

Nous cédons la parole à nos camarades du Comité d’Organisation de la Semaine de la Terre. C’est un tract.

Recto.


Quelques ballons à dégonfler

Le mythe que la nature sauvage n’est nécessaire qu’à quelques rustres originaux.

Le mythe que les ingénieurs peuvent calculer, planifier et imposer le bien-être de chacun à tout le monde.

Le mythe que la nature est faite pour être dominée, maîtrisée, conquise et asservie par l’Homme et pour l’Homme.

Le mythe que la nature est inépuisable et infiniment prodigue pour les caprices d’une exploitation économique forcenée.

Le mythe que la nature pourra être protégée efficacement dans un système économique basé sur le profit, l’expansion et la concurrence.

Le mythe que l’homme sera plus heureux et plus libre dans un monde entièrement gadgétisé, robotisé et artificiel.

Le mythe que les mesures anodines et timorées des gouvernements contre les pollutions suffiront à enrayer la crise mondiale de la dégradation de la biosphère.

Le mythe que la France avec ses 50 millions d’habitants est sous-peuplée alors que la saturation des zones urbaines est déjà cause de maladies mentales.

Le mythe que la réalisation d’un couloir urbain continu dans toute la Basse Vallée de la Seine, de Paris au Havre, sera un progrès réel dans nos conditions de vie.

Le mythe que la construction de logements et de moyens de transports résoudra la crise urbaine dans un monde déjà surpeuplé.

Le mythe que la solution miracle des problèmes énergétiques est dans le développement des centrales nucléaires, et l’utilisation « pacifique » de l’énergie nucléaire (pollution radioactive de l’air, de l’eau, du sol et des chaînes alimentaires).

Le mythe que l’individu ne peut rien faire contre les pollutions et contre les destructions du milieu naturel.

Le mythe que la Planète Terre peut supporter une croissance démographique illimitée sans le saccage et l’épuisement définitif de ses ressources naturelles.

Le mythe que la gloire suprême pour une nation et le secret du bonheur sont dans la prospérité économique, dans les autoroutes à 24 voies, les métro express régionaux, les steppes culturales de la Beauce, les aérotrains et le confort-air-conditionné de tout un peuple d’automates en complets-vestons.

Le mythe que la lutte contre les pollutions et pour la protection de l’environnement est une réforme du système capitaliste alors qu’elle exige, bien au-delà, une transformation radicale de la civilisation industrielle sur des bases de non-expansion et de survie.

Au verso :

Quelques petits trucs à savoir

La population mondiale augmente de 200 000 individus par jour.

Autrement dit, de 70 millions d’individus par an.

Les 3,8 milliards seront 7 milliards dans trente ans.

Chaque année dans le monde une espèce animale disparaît définitivement.

Les terres érodées couvrent 700 millions d’hectares à travers le monde, soit la moitié des terres cultivées.

En France, 5 millions d’hectares de terres cultivées sont sous la menace de l’érosion.

Il suffit de quelques mois pour détruire un sol arable mais il faut 500 ans pour le créer.

Un quotidien tirant à 100 000 exemplaires nécessite un accroissement annuel de deux hectares de forêt.

Chaque année, en France, les incendies détruisent 30 000 hectares de forêt.

A Paris, 1 m2 d’espace vert par habitant. Avec les nouveaux parkings moins encore.

Par an, le béton dévore en France le cinquième d’un département.

Chaque année, la quantité de déchets augmente dans le monde de de 13%.

(…)
Chaque année, il y a 300 000 épaves de voitures en plus.

Et ainsi de suite.

Merci de votre attention.

Fournier
mai 1971 dans Charlie Hebdo

dessin de François Feer
 

« (…) et puis après il y a eu un autre phénomène qui s’est mis en place un certain camarade Alain Claude a fait une manifestation Bd St Michel avec un masque à gaz, c’était la première manifestation avec un masque à gaz… c’était la première fois qu’on manifestait dans la rue avec un masque à gaz et après…« , Pierre Merejkowsky, film « Il était une fois l’écologie« , 2010.
 

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Avec quelques dizaines d’années de recul…

http://www.youtube.com/watch?v=sGEwR1yt5kQ

Raymond Aron

Joan Baez (Sacco e Vanzetti sur la musique de Ennio Morricone)

Geneviève Baïlac

René Barjavel

Lucien Barnier

Malik Bendjelloul

Christian Bertaux

Alain Bombard

Jean Carlier

Cavanna

Bernard Charbonneau

Henri Charnay

Choron

Darwin

Delfeil de Ton

Philippe Douroux

Jacques Delors

Jean Detton

François Feer

Léo Ferré

Solange Fernex

Jean-Luc Fessard

Danielle Fournier

Pierre Fournier

Alain-Claude Galtié

Charles Gide

Patrick Gominet

Pierre Grémion

Michel Gresse

Jacques Grinevald

Alexandre Grothendieck

Robert Hainard

Johnny Hallyday

Jimi Hendrix

Alain Hervé

Ivan Illich

Janis Joplin

Georges Krassovsky

Edouard Kressmann

Henri Laborit

Brice Lalonde

Jacques Lanzmann

Philippe Lebreton

Daniel Louradour

Don McLean

Yann et Isabelle Messiez

Chantal Messiez

Igor Muchins

Michel Mahulot

Vincent Ménager

Jean Meningand

Pierre Merejkowsky

Roland de Miller

Jean et Hélène Monteil

Jim Morrison

Aguigui Mouna

André Naegelen

Arne Naess

Hervé le Nestour

Pierre Pellerin

Armand Petitjean

Catherine Aira et Yves le Pestipon

Poujade

Sixto Diaz Rodriguez

Jean Rostand

Denis de Rougemont (Congrès pour la Liberté de la Culture)

Günther Schwab

Michel Séné

Cat Stevens

Jean-Paul Sartre

Max Tourtois

Lanza del Vasto

Paul-Emile Victor

Antoine Waechter

Michel Weber

Donald Worster

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Jeunes et Nature

Etudes et Chantiers

la nouvelle gauche écologiste

Les Amis de la Terre

Earth Day d’avril 1970

FFSPN (Fédération Française des Sociétés de Protection de la Nature)

Museum d’Histoire Naturelle

Association des Journalistes et Ecrivains pour la Protection de la Nature

RTL

Diogène (« collège invisible de l’écologisme »)

Ecoropa

Congrès pour la Liberté de la Culture (CCF)

Charlie Hebdo

La Gueule Ouverte

Combat pour l’Homme

La Vie des Bêtes,

Communautés de l’Arche

the New Left

Société Internationale de Cybernétique

Survivre et Vivre

« croissance marchande » (PSU)

Friends of the Earth

Agence de Presse Réhabilitation Ecologique

revue Ecologie

Nouvel Observateur

la « troisième voie »

la « deuxième gauche »

the deep ecology

« écologie politique »

Let’s Pollute

Union Mondiale pour la Protection de la Vie

Fédération Internationale de la Jeunesse pour l’Etude et la Conservation de l’Environnement

Quinzaine de l’Environnement